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MÈRE
l'éventail pose sur ton âme
cette rose que je t'ai achetée pour
naître
en renouant le cristal du sort dans lequel
nous contemplons
l'unité porteuse de l'oscillation du
berceau et du cercueil
Quelque chose reste cependant mère
entre les jours et les nuits tombés
sur les villes
qui réchauffent un peu le mot destin
Entre les syllabes amères brisées
jusqu'au ravissement
de tant de cellules occupées à
te consommer
Malgré ces nourritures précipitées
que tu agites
et qui t'aiment avec leurs saveurs si pleines
de futur
parlant avec la voix de la terre depuis ton
coeur
quelque chose demeure cependant mère
dans l'extase des doigts affûtés
par l'obéissance
dans cette caresse trouvée au fond
de l'indicible
j'ai peur de grandir sans empêcher que
tu ne meures
C'est un pain de saveur pauvre bien qu'il réchauffe
quand il est déjà nuit et que
l'on trouve la maison vide.
Luis Álvarez Piñer
est un poète espagnol
____________________________________________________
Francisco
Álvarrez Velasco
La soirée est humide, la nuit s'en vient,
petit à petit, par l'orient
et l'espoir se couvre de rouille.
La mémoire et la roue du temps
sont immobilisées.
La craie de la souffrance s'efface lentement
ainsi que la douleur de la chair exigée,
peu ou prou.
Ta solitude est tienne.
Bois-la gorgée par gorgée.
N'étends pas les mains:
cette heure n'est que poignée de cendres,
pareille au lendemain d'un bûcher.
La solitude est tienne
-A quoi bon les yeux,
la bouche, les mots,
les pas
qui te menaient vers les autres? -.
Gorgée par gorgée!
Ce poème est extrait de l'ouvrage bilingue (espagnol-hollanais) "Les eaux silencieuses" ("Las aguas silenciosas/Het stille water")
D'autres textes de Francisco Álvarrez Velasco sont ici
Des études et des oeuvres
des poètes qui précèdent sont accessibles en
espagnol sur le site Portal
de poesia
Flammarion éditeur
(6 juin)
Dès que l'enfant articule
"Tu es",
il formule le meurtre d'Abel,
l'arrêt de mort primitif de l'Autre.
Une main sans doigts,
du fer et puis des lames,
l'absinthe au lieu de l'aube,
ce qui ôte du sens,
déconstruit l'homme et la syntaxe,
ce que l'on nomme guerre
comme si c'était peu.
(13 juin)
Il y a des fées
cachées dans le tableau,
de ces petites fées de la campagne
anglaise
en robe pastel,
avec une pervenche pour le chapeau.
De loin,
on les confond avec des libellules.
L'une boit dans ses paumes
au bord d'un pot de fleurs.
Une autre s'est posée
près de la boîte aux lettres
dont la peinture verte s'écaille.
Depuis trois jours pas de courrier.
Seul le journal,
les faits divers.
(5 novembre)
Côté cour
derniers feux jetés du géranium
avant sa longue retraite
dans l'ermitage de la cave.
Côté jardin:
une nuée d'abeilles
sur le lierre encore en fleurs.
Comme on cache des oeufs,
nous plantons des bulbes de jacinthes
aux pieds des iris,
à côté des lavandes et
près de la bruyère.
(25 décembre)
Aujourd'hui,
les maisons demeurent closes
leurs barrières tout autour
comme des poings serrés.
Le ravi est à l'asile,
les braconniers en garde à vue.
Abrité par ses persiennes,
chacun épie l'étranger qui passe.
(1er avril)
Carpe diem:
Quelles rive,
hier vives de loups,
emprisonnent
en leurs filets
un regard
d'onde où vibre
l'alose
d'un iris vairon?
Le fil en proie
aux errances du vers
plonge
sa ligne dans l'encre rouge et
les cendres des chimères
où le pèlerin hésitant
choisit
entre
ombles et ombres
jusqu'aux mots brochés dans la nasse
du papier.
_____________________________________________
Saorge,
dans la cellule du poème
Voix d'Encre éditeur
Saorge germinative
perlée, dépouillée,
humble sous la lombarde
qui manie le fouet
avec sa poigne de vent.
Saorge panifère et abreuvante.
Dehors,
sur une terrasse du jardin,
un laurier amoureux,
dont deux branches enserrent
le tronc entre leurs bras,
fait rougir de désir les orangers voisins.
Déjà, quelques abeilles inventorient
les promesses des mélèzes.
Au puits,
nous puisons des mots.
L'écriture est un mythe,
une incessante résistance,
notre tension vers...
Cela suppose l'exil et la fracture,
Loin de...
Un autre texte de Chantal Dupuy-Dunier est
ici
Encres Vives - Collection Encres blanches
.
La Danse d'Aphrodite . ... Ses oreilles délicates ont la couleur des coquillages des rives de l'Euripe et sont la parure de sa nuque alabastrine! Un collier de perles
Mais, ce qu'il y a de plus beau
Oui, ses mammes sont si opulentes
Les plantes de ses pieds sont
|
Encres Vives N° 365
Tu sais que je m'enfonce. Que j'ai besoin de créer des murs autour du silence. De lui construire une gangue. Un piètre édifice. Tu sais que je m'enferme pour chercher. que je parle avec un double. Que je frôle des canines aiguisées. Tu voudrais que je parvienne à expirer, lentement, comme un ballon de baudruche percé. Un sifflement perceptible à qui prête l'oreille.
Écoute mourir la soif.
... Dans la poêle, à feu vif, le sang caillé d'un soleil noir.
... les fruits oubliés qui font l'alcool des maraudeurs,...
Laisse couler la bouche, fondre les lèvres
à la faveur du sommeil. Le ravinement dérobe la mémoire
des berges et dépose la plaine des tendres. Un marcheur empiète
sur la clarté de son ombre.
Encres Vives N° 366
Les
paroles depuis l'enfance ont créé des lieux de paix dans
les replis de l'âme
...
Le paysage, comme le langage sur la page,
rayonne de résonances.
C'est l'infini qui y converge - toutes les
images, tous les présages,
et les pulsations de nos nuits, là
où se crée le rythme qui tout réverbère
sans rien défigurer, aucune ébauche,
aucune attention. a chacun son reflet
dans la parole où puise le familier
aux mille visages, aux inflexions variées,
dans le paradoxe de l'être, le même
mouvement des lèvres, la même joie,
le même effroi - une seule ardente figure
pour un déploiement illimité de lueurs,
de moirures, nuances et infléchissements,
autant que nous sommes,
avons été, serons, chacun, notre
particulière floraison qui se reconnaît
en sa singularité dans l'immobile résonance,
aux aguets,
l'oreille du monde en sa clarté, azur
et or
au paradis de l'instant, qui est l'éternité
de l'enfant.
...
Le chemin le plus ardu ne mène nulle
part si ce n'est à lui-même
...
La mort triomphe de la main vaincue,
qui ne connaître d'autre vengeance que
la plume,
sa pleine mesure, sa détresse,
sa plénitude d'inquiétude, sa
tâche d'écriture.
...
Il est dans l'existence des présences
en filigrane,
des modèles, à certains égards,
des figures lointaines
qui tracent des idéaux.
...
...mais les mots ne sont pas le baume. Ils
sont
plaisir pur posé à côté
de l'irréparable malheur,
...
Vertige
Joie,
générosité d'être
dans le dépouillement du vivant,
Joie,
cri de l'être au seuil de naître,
et puis l'angoisse,
retournée comme un gant.
La joie au deuil du temps arrache la parole.
Cette chute dans le vide est un envol,
aussi.
D'autres textes de
ce poète sont ici
Encres Vives N° 367
silencieux
ils portent en eux leurs mystères
et leur silence est éloquent
des larmes ont séché sur leurs
joues
on ne peut rien en dire
pas plus qu'on ne peut deviner
l'étendue de leurs secrets
ils n'ont ni futur ni passé
ils vont et viennent sans un mot
et rodent autour de leur enfance
et pourtant leur cri est limpide
comme une main qui se tendrait
vers un nuage disparu.
consigne
n'ayez pas peur laissez-moi faire
confiez-moi vos rêves et vos désirs
ouvrez vos portes et vos fenêtres
aux vents de tous les déserts
aux nuages de tous les cieux
laissez-moi faire
vous pouvez partir tranquille
en me confiant vos clés
en revenant tout sera là
rien n'aura bougé rien n'aura changé
n'ayez pas peur laissez-moi faire
je suis l'oubli je ne fais rien.
Gallimard
Ferais-tu cent photos de moi qu'aucune ne ressemblerait
à
Une autre: comment alors m'y retrouver avec
mon visage
Comment me reconnaître dans cette image
que je lis dans
Tes yeux comme si quelque chose du désastre
avait passé
En moi un vent qui caresse l'escalier des
vagues jusqu'à l'
Énigme de l'horizon tous ces si j'étais
comment savoir ça
Cette poignée de veines ces mots qu'on
aurait voulus cela
Qui ne se fixe pas sur la pellicule: j'ai
toujours pensé que
Si les oiseaux fuient quand on s'approche
c'est sans doute
Parce qu'ils parlaient de nous qu'ils échangent
des secrets
Sur nos hanches sur les arbres de nos doigts
sur ce visage
Qu'on croît connaître mais tes
mains seules en font le jour
Et la nuit: ça ne ressemble à
rien un visage c'est du passé
Qu'on garde dans ses tiroirs pour se souvenir
après quand
On ne sait plus même la douceur de ses
collines son matin
Un autre texte de d'Alain Duault est ici
L'arbre à paroles
Attouchement d'espaces
autant de sable dans la mie de pain
Le paysage se met à table
Parmi les ronces les chairs
la parure étoffée du soir
la page à flanc de coteau
Curer les fossés délivrer les
marges
c'est obstinément ferrer le chant
Dans le lavoir il pleut des pierres
La mort sent le renfermé
Et si l'attroupement était suspect
des cailloux sur le muret
La perle ne donne pas son nom à l'huître
La direction de l'est
pour passer au large du cap
le cours est rapide Le fleuve
Tes mains qui cherchent
l'orage ou le sac de blé
Un autre texte de Jeanine Baude est ici
Encres Vives N° 368
Récit
Toi tu reviens de loin
sanglé dans ton costume d'éclipse
mais le coeur en charpie
Combien de fois
tournas-tu en orbite
autour du soleil
Aux lisières de la félicité
tu sais que le temps est toujours libre
le mouvement nu
et les piques de foudre
signent l'art de vivre
S'étreindre près de la mer
retombée en enfance
Offrande
Comme un orage tu surgis en moi
suscitant des folies artésiennes
La sueur coule au front des ténèbres
De frayeur le cyprès blanchit dans la
nuit
Les présages tombent de si haut
sur nos vieux jardins de lotus
qu'ils se dissolvent aussitôt
comme le son des flocons de neige
Que de lunaisons
avant que ne se décante
le désir torréfié
à flanc de souffrance
Entre la matière et l'esprit
ruisselle une lumière dorée
Ne demeure
que l'aura d'un amour infini
D'autres poèmes de Francesca Y. Caroutch
sont ici
Encres Vives N° 369
Les Pigeons de Chinon
...
Les pigeons de Chinon chient
Ceux de Given aussi
Mais ceux de Nancy
scient
de Gavarny
nient
et de Paris
rient
Seuls ceux de Chinon
ainsi que de Given
chient
Les mots brûlent parfois les entrailles
la peau
Pourquoi tous ces efforts
quand des pas vous conduisent
vers un port sans bateaux
L'oubli est au bout de la vague
quelque chose de vague
qui boit les souvenirs
mais jamais ces regrets
d'avoir trop longuement
joué avec les mots
comme avec une flamme
sans voir qu'elle pouvait
allumer aux racines
l'incendie qui dévaste
la forêt d'une vie
puis regarde sur l'eau
l'ombre de la douleur
monstrueuse danser
sous des nuages noirs
Encres Vives N° 370
Si je me souviens de la guerre, c'est que j'ai
vieilli.
Et sur la photo l'étable reste bien
seule en ses pierres et sa terre cuite usée du toit.
Gros plan sur le mur de derrière où
tuiles touchent arbustes, orties, ciel bas.
Mais la pommeraie, où?
Deux barrières à fils de fer
(on pense à la couronne d'un crucifié à la guerre),
à pieux d'avant le déluge (troncs mal écorcés,
barbelures noires de pluies anciennes) qui bornent un sentier d'herbes.
Des près à vaches mais déserts
en ces heures où les insectes travaillent la terre, et dans et sur.
Pommeraie qui s'élève jusqu'à
un ciel de vieux bleu écaillé, traînées de mauvais
temps, en est bien quand même.
Quel enfant qui n'aurait pas vieilli se souviendrait?
Le silence, on dirait qu'il rouille.
Un autre texte de Marcel Migozzi est ici
Au parloir des solitudes (extraits)
38 J'arrachais des ronces
un oiseau
s'est envolé
au bout
de mes doigts.
67 L'ami retrouvé
n'a pas
vieilli d'une ride
mais
c'est dans le coeur.
D'autres textes de cet auteur sont ici
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Jean-Pierre
Siméon
Le jour où un homme a bâti une
maison sur la terre
là où d'abord il dormit avec
les vents
ce jour-là il a nommé le temps
en lui donnant séjour
Il fut celui qui dit:
une éternité me manque
et désignant le seuil
où s'arrêtait le monde
il fit de chaque jour un souvenir
une absence dans la chambre
ainsi il inventa la mort connaissable
celle qui grandit avec le mur l'arbre et l'enfant
et bientôt laisse ses souliers à
la porte
depuis lors nous savons que la maison est vaine
...
______________________________________
Béatrix
Balteg
J'habiterai
J'habiterai une roseraie
pour que chacune de mes cellules
soit pétale de fleur
J'habiterai le lit de la mer
pour que mon sang
soit arc d'écume
J'habiterai le nid de la terre
pour que ma chair
devienne fruit
J'habiterai l'écorce de l'arbre
pour que mes membres
ricochent sur des siècles
D'autres textes de cet auteur sont ici
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Jean-Albert
Guénégan cité par Françoise
Coty
... Il rentra dans sa maison, s'empara des
"Amours Jaunes" et s'affaissa dans un fauteuil. Il relut les "Rondels
pour Après" pour leur fraîcheur. Sortant de la nuit des
temps et de sa jeunesse il se remit à sa table de travail dans l'espoir
insensé que la page blanche se noircisse. Mais la feuille de papier
s'entêtait, heureuse dans son grand nord du rien à dire, pas
prête à se laisser envahir par un flot de mots orageux, trempés
dans l'encre du ciel.
...
Extrait de "Dimitri et les livres" - Éditions la clé du jardin
Un autre texte de ce poète est
ici
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Max
Alhau
"Pierre veilleuse
qui ne connais
ni le sommeil ni la mort,
qui voyages immobile,
fermée sur ton ombre,
sois pour nous
ce jour et cette nuit
à jamais récusée,
cette plaine sur laquelle
il est permis
de renoncer à tout espoir
de se porter ailleurs.
"Qu'y a-t-il derrière le vide?
peut-être cette profondeur
qui habite la parole.
ce souffle que l'air
ne trouble pas,
mais surtout l'infini
sans lequel rien ne commence."
Extrait du recueil "D'asile en exil" - Editions Voix d'Encre - Prix Georges Perros 2008
Un autre texte de ce poète est
ici
Éditions Arma Artis
Tout l'amour
de la Mère
est la mer
de l'amour
qu'illumine la grâce.
(1997)
Mémoire de la Licorne
quand un homme m'approche
dans le silence des bois
de ma corne de feu
je lui ouvre le ventre
pour qu'il reste à jamais
dans l'éternité de l'amour,
et je bois le sang frais
qui s'écoule peu à peu
de sa plaie dessinée
sur ma tête candide
La figure de l'aimée est la face
de Dieu.
Si obscure
la clarté qu'illumine l'abîme! Encore Issa! Couvert de papillons
Le cadavre palpite... |
Et l'abîme
se creuse
dans l'abîme
qui se creuse
de l'abîme
à l'Abîme -
qu'à l'abîme réponde
la voix nue
de l'abîme
où
se tait
toute voix
de l'abîme
qui se creuse
dans l'abîme
où se creuse
cet abîme
de l'Abîme...
Un autre texte de Michel Cazenave est
ici
Éditions Soleil natal - Collection Nouvelle Tour de feu
Ceux qui, dans leur jeunesse, ont eu la révélation de la mort éprouvent une certaine répugnance pour l'oraison funèbre sous toutes ses formes.
Le silence n'est pas absence - ou carence - de paroles. C'est la parole qui se révèle usurpation du silence.
A la croisée des signes, l'écrivain attend le moment où les mots prendront racine.
Tu ajoutes un mot à un autre, rayes,
effaces, déchires ou non pour finalement te retrouver aussi désemparé
qu'avant.
Dans le temps divisé
Les Cahiers du Sens - Le nouvel Athanor
Toutes les nuits, je fais le même rêve. Je me promène dans le jardin. La nuit est tellement noire que j'avance à tâtons, et sans bruit pour ne pas être repéré. De ma chambre dont la fenêtre est ouverte, un homme m'observe, immobile.
Toutes les nuits, je fais le même rêve. De ma chambre, immobile, j'observe un homme qui se promène dans le jardin. La nuit est tellement noire qu'il avance à tâtons et sans faire de bruit.
Un jour peut-être, ces deux hommes n'en feront qu'un. Ce jour là, j'aurai cessé de rêver. Les deux hommes aussi, il faut l'espérer.
Le site de Denis Emorine est
ici
Éditions Poiêtês
...Sphères d'exil... Midi flairant
la
solitude des rapaces à leur gîte, flairant l'argile de la demeure sans porte...
...Trois étoiles comme des yeux de
...L'odeur des cactées nous ravine la
|
L'enfant joyeux court
comme un voleur
dans la forêt éprise de songes
Le caillou de sa fronde
chante la victoire
sur les ombres du destin
Il frôle l'horizon
se glisse dans la bruyère
se mire à la fontaine
qui lave les faubourgs
et fait renaître les jardins
endormis par l'hiver.
Un autre texte d'Éliane Biedermann est
ici
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Alain
Lebeau
Le pays d'ailleurs
C'est un pays d'ailleurs
Une île solitaire
Un lac de cailloux
Où les serpents tètent les chimères
C'est un pays de longues barbes sages
De vieillards accroupis
Et de guerriers furtifs
C'est au guichet de lourdes portes
Qu'on y dévoile la face cachée
des femmes
C'est un pays de chaud et froid
De chevauchées interminables
De combats de molosses
De cris de faucons noirs
Sur les guirlandes enneigées
On y reçoit l'appel à la prière
Entre deux rafales mortelles
Deux râles empalés
Au-dessus des ruines de pisé
...
C'est l'Afghanistan
...
D'autres textes d'Alain Lebeau sont ici
Départ et augures contradictoires
L'enfant s'en va dans l'aube noire
Les brouillards sont plus grands que lui
Il part et des ombres s'agitent doucement
Sur les talus qu'élargissent des lumières
pâles
La peur c'est comme un cheval fou
qui galope au loin près des arbres
Et ce qu'on entend c'est le vent
Qui se heurte aux portes du vide
Peut-être un jour de calme se prépare
Où des oiseaux feront très vite
De larges signes dans le ciel clair.
D'autres textes de cet auteur sont ici
Maison de poésie
D'amour et de mort
Amours en allées
Le long des allées
Menant à la mort
Vous avez sans doute
Ignoré la route
Vers le divin port.
Des voix
... des voix, des voix parfois muettes
mais gonflées de sens et de sève
pouvant résonner dans les têtes,
des voix venues d'ailleurs et pourtant familières
murmurent sans relâche à qui
veut les entendre:
IL EST PLUS TARD QUE TU LE CROIS.
Ombres errantes
Le peuple pâle des morts-nés et
des fantômes
A laissé des lueurs fragiles dans les
marges.
Entre vie et non-vie vole mainte existence
Apparaissant et s'effaçant dans l'intermonde.
Atomes d'énergie et lueurs de conscience
Perdues. Mondes pourris. Bouillonnement cosmique
Brassant des dieux déchus, des êtres
improbables
Des rêves sans rêveur luttant
contre l'oubli.
Savoir que ce chaos n'est qu'un jeu de folies
Loin du Réel. Les dévoiler.
Et les détruire.
Tout est vrai
Tout est faux! déclare l'aveugle.
S'il a dit vrai, tout n'est pas faux.
S'il a dit faux, tout n'est pas faux.
Tout est vrai! lui répond le sage.
S'il a dit vrai, tout est donc vrai.
Si tout est vrai, il a dit vrai.
"Un long regard sur le calme des dieux".
Ou sur l'enfer dont souffrent les damnés.
Ou sur des riens, d'ordinaires sottises.
Tout peut être pensé, dit, contredit
Et nos erreurs même sont vraies.
Un autre texte de ce poète est ici
Éditions du Cygne
Les Roosens
Décembre soufflait sa buée de
merveilles
Dans les aquarelles neigeaient des étoiles
Hameau palpitant autour du foyer
- topaze de vigilance
Que de rêves derrière le givre
des vitres
Le visage de l'aïeule
donnait un nom à la cécité
solaire
Dans la pénombre luisait une orange
petit soleil régnant un an
sur un coin de la cheminée
Ébriété des nuits piquetées
par le cri
d'invisibles oiseaux
Dans l'île aux longs yeux de pirogue
belle à en perdre la raison
l'enfant d'une grâce inhumaine
comprend soudain
le chant des merles
la féerie de la rosée
le grognement de la truie
le gémissement de plaisir de la brise
dans les citronniers
La sève du verbe jaillit
jusqu'aux frondaisons flamboyantes
Maître de la discrétion
et des nuances inconnues de la soif
qui brûle les entrailles
La campagne bleutée tremble un peu
derrière une flambée de chardons
Près des bois d'aubépine
d'invisibles alouettes
ivres de leur ode au vertige
très haut dans les cieux
se laissent tomber presque jusqu'au sol
Elles grisollent
comme toi
qui rend vivants
les métaux morts
Serments scellés
Un matin te croyant seul
je t'ai vu te prosterner sur la terre mère
et lui faire une offrande de miel
Des langues de feu ceignaient ton front
Puis la vie reprit son cours
pas ordinaire
A présent c'est moi qui suis seule au
monde
Seule la lune qui me regarde fixement
sait où je gîte
sur l'échine de la Terre-mère
D'autres poèmes de Francesca Y. Caroutch
sont ici
et ici
...
Ce monde à cuit sa haine... a filtré
sa vengeance, abruti la pitié! Il viendrait clouer le pardon des
morts, le baiser des justes! La nuit tout entière écrase
ses pauvres, sue sa honte et ses lâches!
Plus fort et plus vite! D'un horizon qui les vomit à l'horizon qui les dévore! De la gueule de glace à la gueule de flammes... Plus fort plus vite!
Ils sont là tout près. Je les vois malgré l'ombre... J'hésite... On dirait qu'ils sont beaux. Des profils plus droits que ceux des médailles... des lèvres dont l'arc est pur et sans flèche.
Mais je les connais. Je sais ce que vaut cette graine et ce qu'il en sort: ses puissants et ses capitaines.
Plus fort et plus vite! Allez en désordre! Allez en cadence! Tout ça c'est pareil! Le vieillard et l'homme! C'est la même griffe! C'est la dent vivante et la dent rongée! je n'aime pas la main pesante! Je n'aime pas la main tremblante! La vieillesse désarmée, fétide, cette sale vieillesse me dégoûte!
Et leur femme tendue comme un piège dans l'herbe... Celle qui se souvient d'avoir fait alliance avec le serpent! Celle qui nous pique et ne pense à rien... Repliée au soleil, tout heureuse d'être chaude, roulant son ventre ouvert, ses longs yeux vénéneux!
Voilà avec qui il faut rire, mentir
et trahir! Allez! Allez! plus vite! Je veux vivre! Alors je vais dire que
vous êtes majestueux, patients, doux, candides et c'est moi qui jetterai
la dernière pierre! Malheur à l'homme seul!
...
On n'est jamais seul
quand la mer rapporte les voix des amis
on n'est jamais seul
quand le ciel et la terre sont du même
poids à midi
...
L'oiseau que je te donne fait la roue sur ton souffle - L'oiseau que tu me gardes - un paon aux yeux de vierge... C'est le seul de sa race
Il vient sûr de lui-même. Il jette ses gants sur ton lit. Ce soir c'est avec toi qu'il couche
Il dit qu'il est l'Amour
...
D'autres textes de cet auteur sont ici
Éditions Fata Morgana
Tout ce qui compte, tu le sais, est liseré, lisière. Je pense à ce qui tremble. Ce gibier-là, soyeux, est de peau transparente sous l'oeil dur des fusils. Le sang aussi, facile à prendre. L'oiseau nous oubliera.
Mais toi, dans ce pays. Noire et dorée comme est la moisson de l'orage. L'épée du vent divisera le sel. Tu seras, mon amour, entrebâillée. Ton sang qui flue garnira l'obscure lampe, irradiera. Tu parleras la langue.
On ne saura jamais ce qui fait la nuit s'éclairer à la noirceur. Un ange est là, avec son dos terrible. Pour protéger nos dos.
Et la rivière aussi est là, enfouie avec ses ruches. Le temps est au silence.
L'abeille est brève entre l'aube et la fleur.
D'autres textes de cet auteur sont ici
Éditions Amalthée
Marie-Ange
Elle pour qui la planète est une pomme
en suspens
Avec le sourire à entendre accorde
Les soucis du jour dans le mystère
de la dérive
Suis calme avec toi comme un fou quand il aime
Exerce son espiègle pertinence la Nine
Où connaître que vivre n'est
qu'échange du tout et du rien
Elle m'écoute en dormant rêver
dans sa nuit
Éditions Caractères
...
Nous voici tous deux à la terrasse
du grand café
sur la place où ne passent
que piétons et bicyclettes,
il palazzo communale, derrière
nous
la loggia dei militi derrière
le kiosque à journaux -
mille couleurs, titres et photos,
le bavardage du monde tel qu'il va,
la mort entre les lignes, qui nous lorgne,
tant de victimes, les chiffres, à corps et à cri -
le baptistère, en face, et puis la
cathédrale, il Duomo,
de marbre blanc, rosé, vert pâle,
par-dessus les briques lombardes
et les deux lions, mignon minois,
qui gardent l'entrée, de part et d'autre.
Je me demande toujours ce qui fait la richesse
d'un symbole
ou l'extrême beauté d'une forme
- si ce n'est pas,
tout compte fait, l'attirance dans la parfaite
ignorance
des tenants et des aboutissants.
Le symbole est l'éprouvé de la
parfaite innocence.
...
Est-ce donc bien la blessure, et nulle autre
qu'elle, qui nous dit que nous sommes vivants?
...
La blessure, c'est le temps qui nous fend;
...
La beauté n'est pas un rêve de
pierre, mais la forme mouvante de nos instants...
.
D'autres textes
de ce poète sont ici
Éditions Edilivre
...
Je raconte un sentier rocailleux un vieux
piano
Une mansarde poussiéreuse
Une cour ouverte sur un bouquet de ciel
Aube griffée sur un port désaffecté
Mélancolie de la pluie sur la mer
Je raconte à voix basse l'arc-en-ciel
Kaléidoscope sur le pont du large
Aquarelle délirante
Lavée de ta silhouette
Au loin égarée sur une île
vierge
Je te raconte la mort de ta chienne
La résurrection de l'ennui
L'effacement de ta mère
Un soir d'amour triste
Les volets du jour
Refermés sur les nuages
Seul je te raconte ô Violaine
Enfant instantané de l'orage et de
l'éclaircie
Les yeux mouillés d'étoiles
Le peu de clarté qui m'habite
Une enfance à peine de mémoire
ardente
Une éternité de légende
inavouable
...
D'autres textes
de ce poète sont ici
et ici
Encres Vives N° 371
Dans la lenteur du jour qui naît des mots les pas s'en vont et se retournent. Le point n'a pas de point qui lui succède et du même poids pèse à cet endroit. Nous ne sommes pas en terre de similitude. Descendre alors dans les profondeurs de la langue, amener vers soi les strates accumulées à la lisière du temps. Là où la voix s'articule à l'écriture. Tu ne sauras jamais d'où vient ce que tu dis, ni si le sens que tu prêtes connaît son propre sens dans l'épaisseur des sens passés et à venir. Dire produit une béance dans l'infinité des fils qui s'entrecroisent. Écrire engendre une blessure dans le tissu vivant du langage.
... Qui ne laisse pas trace de son passage est né en vain...
... Il n'est ni spontané ni facile de contraindre la langue à la juste expression...
D'autres textes de
ce poète sont ici
Encres Vives N° 373
Autant de feuilles en la forêt que je traverse, autant de faces appelant mes cours d'eau. En leur cérémonial de lenteur intuitive, l'aubier et les écorces décrètent un jour sans feu d'épines. Filtrer la charge de lumière qui, sans la voix du récitant, serait déluge ou sécheresse.
Le long des failles des rochers, une herbe rare. Les horizons sont obstrués. La défiance altère l'air. Il est besoin d'ensemencer et d'assouvir nos évidences. Il est donné à la parole de traverser l'impénétrable.
Avant l'aube levés pour couronner l'inconnaissable.
Arborescences, et l'impatience des sommets. Dans les vallées, échos,
reflets. Cesserions-nous de désirer?
L'ARAIGNÉE
En parcourant sa toile
cette lune plus que blanche
l'araignée ne dort jamais.
LES OIES
Pour un rien les oies
sonnent l'alarme
de leurs trompettes de boue.
FEUILLES SÈCHES
Le jardin est plein de feuilles sèches;
jamais je n'ai vu tant de feuilles
dans ses arbres verts au printemps.
Extrait de "Caleidoscopio
nocturno" - José Juan Tablada est un poète mexicain
Encres Vives - Collection
Lieu N° 211: Inde
Haleine de Nénuphar
Quelle merveilleuse sensation
Précisément, en quoi consiste
la douceur,
Et comment ne pas songer
Or, ton amour surpasse
|
Les pistes de l'envol
...
A l'écoute toujours de ce rire inquiétant
qui
radoube l'écho qui marchande les pluies
je
m'appuie doucement contre le mur de tes départs
les singuliers - face à la nuit - debout
contre les pouls de la fatigue
J'ai navigué dans ces rumeurs j'ai eu
vingt ans sous ces linceuls
On me pendit au mât de très anciens
soleils habillé pour tout dire d'algues
poivrées
et d'éperviers géants
Entre le flanc et l'eau je m'habitue
aux cris des profondeurs
Je parle à d'autres dieux
...
Je perds mon ombre à chaque escale je
penche un peu vers l'horizon
Il nous faudra vêtir cette nouvelle terre
que l'on nomme sommeil il nous faudra
marcher dans l'or des galaxies
où gravitent des mondes
puis s'étendre en pleurant dans les allées du froid
Tout recommencer pour apprendre aux couleurs
les joutes du regard
le cri de l'oiseleur
D'autres textes de Jean Chatard sont ici
et ici
Encres Vives N° 374
rupture et
le temps étiré de plus en plus
vers l'ouest où les rouges reviennent
présence est-ce possible
la voici affleurante
sur la plaque sensible de l'étang
feuille rouge
autre réduction
d'une barque tirée
haut sur le sable
de la multitude
papillons pas plus gros que grains
de sable coloré jaune bleu gris
nos tas de petits trésors accumulés
d'où sortir éclats et éclaboussures
D'autres textes de Chantal Danjou sont ici
Cañasanta (Revue d'Art et de Littérature latino-américaine)
(De "Écho du Feu")
Tu sais que je n'ai jamais eu d'âge seulement
des battements
pour annoncer toute la rosée
que verse ton corps
sur le dernier iris du désir
Seulement cette chanson croissante à
fleur de soif
qui souligne mon destin
Seulement ce navire insomniaque qui échoue
en toi
sans que le saches.
(De "Revolver de l'amour")
Tandis que je continue de t'aimer
Juan Gabriel
Que Dieu entre dans ta poitrine
avec une lampe sans temps
et que fleurissent les enfants
comme un jardin de miracles lilas
Que le pollen de ton rêve
adoucisse ton regard
et que tout le rêvé te couronne
(Tandis que je pleure dans l'obscurité
en continuant de t'aimer).
Juan Castillo Fan est un poète péruvien
La revue Cañasanta
d'Art et de littérature latino-américaine est ici
Je n'étais pas un poète, je dois avoir été un grand fakir, un sage. J'ai supporté des choses ignobles sans piper, cherchant les raisons du mal. J'ai compris que le mal n'existe pas plus que le bien. Alors je suis devenue nihiliste: le matin, je prends ma tension, je tâte mon pouls, et je pense combien d'heures me restent avant de monter à l'échafaud qu'est la vie. J'offre ma tête à mes éditeurs, qui me laissent repartir une fois encore. Exactement comme à l'asile où, chaque jour, on nous rassemblait et on faisait l'appel pour nous laisser repartir ensuite: une torture qui a duré dix ans. Jusqu'à ce qu'une grande bourrasque, peut-être une grâce, peut-être une grande magie, m'a fait échapper à ces grilles. Et j'ai commencé à me demander pourquoi j'y étais entrée et c'est devenu une seconde torture.
La douleur n'est rien d'autre que la surprise de ne pas se reconnaître.
Un poète ne rejette jamais ses propres ombres.
La lobotomie est la touche finale d'un grand coiffeur.
Alda Merini, une Antonin Artaud
italienne?
Librairie-Galerie Racine
L’AMANDIER DES MARTIGUES
A Jo
D’arbres fascinants Humains n’ont pas fini
de rêver
de boire et de manger:
pins chênes verts micocouliers
et pour ceux
de l’au-delà des mers
zelvokas ginkgos hananokis
D’arbres où l’homme étend
son identité:
arbre de neige, chêne
écarlate
et l’érable qui
est de charme, argenté
ou du fleuve Amour
D’arbres multiples polyphoniques
d’arbres mortels fruits défendus…
Mais ce matin j’oublie les dictionnaires et
les académies
les acacia acacie ailante albizzia
aliboufier alisier
Pour aller en ce neuf février
contempler mon amandier
Brassens en fit chanson légère
Belle grignotant toute sa récolte
Lamartine méditation:
Allégorie de cette
vie
Qui feuille à feuille
s’enfuit
Mais c’est Van Gogh que je choisis
Mon voisin d’Arles
qui en février 1888
fut dit-il transporté
par tous ces blancs
et ces vergers qu’il
voulait refigurer
d’une gaieté monstre*
Il se donnait du
mal Il éreintait la toile
Mais foin de la technique
et des Indifférents
Ce matin pour Vincent
L’amandier des Martigues
Aide le ciel renaissant…
* lettre à Théo
D'autres poèmes de cet auteur sont ici et ici
Le blog de Jean-Jacques Dorio
est ici
Cañasanta décembre 2009
X
Avaler
la nuit
jusqu'à
mourir
dans
les
fenêtres
de la
lumière
j'ouvre mes jambes
en pleine recherche lunaire
et je rencontre des lapins.
Yamila Greco est une poète
argentine. Son blog est ici