Le texte de ce carnet, présenté
par ordre chronologique, peut être lu à la suite. On peut
également le lire en diagonale en cliquant les mots-clés
du sommaire ci-dessous. Par ailleurs, des liens ont été créés
entre le texte et les illustrations. En cliquant ces liens, on retrouvera
immédiatement les photos correspondantes.
Antananarivo La monnaie Jean Laborde Les Repas Les Hauts Plateaux Le riz Antsirabe La Religion Le retournement des morts L'artisanat zafimaniry Les brèdes Le raphia Le Sisal Le papier Antaimoro L'Horombe L'Isalo Les voleurs de zébus Les mariages malgaches La coupe des cheveux La circoncision Les jumeaux Tuléar Ifaty La forêt de baobabs Le musée de la gendarmerie La réserve de Périnet A l'école Les claies de bambous La culture sur brûlis Foulpointe Tamatave Sainte-Marie Nosy Boraha Le cimetière des pirates Divers renseignements
1er jour: Antananarivo (Tananarive ou Tana)
Change au bureau de l'aéroport où le cours est plus favorable.
A Madagascar, le taux de change fluctue selon les lois du marché. A titre indicatif, pour un franc français on obtenait, en mai 2001, environ 900 francs malagasy, soit, pour un euro environ 5940 francs malagasy.
Il existe deux unités monétaires: le franc malagasy et l'ariary. Les prix sont affichés en francs malagasy, mais les pièces de monnaies sont trompeuses. On trouve des pièces de 250 francs malagasy, 100 francs malagasy et 50 francs malagasy. La valeur de ces pièces, exprimée en ariary, est marquée en grands caractères. Il ne faut pas confondre ces unités monétaires dont les valeurs sont très différentes.
Le franc malagasy n'étant pas convertible, l'argent non dépensé sera perdu. Il n'est donc pas conseillé de changer trop d'argent lorsque l'on approche de la fin du séjour.
On peut faire usage de cartes de crédit dans les hôtels les plus importants et dans quelques magasins. Mais ceux-ci sont très peu nombreux. Parfois un montant minimum est exigé (l'équivalent de 100000 francs malagasy).
Le retrait d'argent dans des distributeurs n'est possible que dans les grandes villes: Antananarivo, Tamatave. Encore convient-il de préciser que seules deux banques, la BFV-SG et la BMOI, offrent ce service et que les distributeurs sont très rares. Il est également possible d'obtenir de l'argent au guichet avec une carte de crédit, Visa par exemple. Mais les délais d'attente sont dissuasifs. Il faut compter au moins une heure.
Arrivée à l'hôtel Tana Plaza, en face de la gare aujourd'hui désaffectée.Il n'y a plus de trains à Madagascar. Mais les infrastructures ont été conservées et il serait envisagé de remettre le réseau en activité après l'avoir modernisé.
Visite de la cité. On nous met en garde contre les vols. Le port de "bananes" et de sacoches trop visibles est déconseillé. Les malandrins sont très habiles. Il est préférable de placer son argent dans des poches serrées contre soi.
De la haute ville, vue sur le stade et le plan d'eau artificiel, la colline d'où les troupes coloniales françaises intimidèrent Ranavalo en bombardant la ville, le quartier des administrations, le palais de la reine, la résidence du premier ministre, la maison de Jean Laborde... Ce qui frappe d'emblée, c'est l'étendue de la cité et la grande dispersion des maisons par endroits séparées par des terrains cultivés ou des bosquets (Lien sur les photos de Tananarive).
Jean Laborde était un commerçant français installé dans l'océan indien au 19ème siècle. La reine de Madagascar le chargea de réorganiser la poudrière de l'armée. Il fit creuser à Tananarive un lac artificiel en forme de coeur entouré de jacarandas, un arbre à feuilles fines et à fleurs mauves. Au milieu de ce lac, se dresse aujourd'hui la statue d'un ange qui symbolise le sacrifice des soldats français et malgaches tués pendant les deux guerres mondiales. Jean Laborde fit également construire le palais de la reine, bizarre mélange de styles, que l'on aperçoit sur les hauteurs de la ville. Ce palais a malheureusement été détruit, en 1996, par un incendie criminel. Le mobilier qu'il contenait a pu être partiellement sauvé. La reconstruction du palais est envisagée. Mais les fonds exigés sont considérables. Un aigle monumentale, aux ailes déployées, qui n'est pas sans rappeler l'emblème de Napoléon, veille sur l'entrée de l'édifice dont subsistent seulement les murs (pour en savoir plus sur Jean Laborde, cliquez ici puis allez dans la rubrique "Histoire" du site).
Déjeuner au cours duquel nous prenons contact avec la cuisine malgache. Au menu de la viande de zébu, le boeuf de Madagascar pourvu sur le dos d'une bosse de graisse (Lien sur les photos de zébus). La chair du zébu vaut celle du boeuf. Mais, au bout de quelques repas, on s'en lasse. Heureusement, la nourriture de l'île est assez variée. De nombreux animaux domestiques y sont élevés: porcs, volailles, lapins, chèvres, vaches... ces dernières pour le lait et le fromage. Il existe un BSN local, semble-t-il très populaire. Il possède pratiquement le monopole des eaux minérales, du lait, des yaourts et du fromage. On trouve aussi bien sûr les produits de la mer: poissons, langoustes, cigales de mer... abondants et savoureux. Sur la carte des boissons, je note la présence de vins locaux, aux côtés des vins français. Malheureusement, il n'y a pas de demi-bouteilles. Je devrai me contenter d'une bière fraîche d'ailleurs d'excellente qualité. (Pour accéder à une recette de cuisine malgache, cliquez ici ).
Suite de la visite: le palais présidentiel, le marché aux fleurs, la poste centrale, le grand escalier, le marché aux pavillons... Les pharmacies sont gardées par d'imposants vigiles armés de gourdins. Les médicaments sont hors de prix. Il n'y a plus de cinéma à Tana.
Au crépuscule, des marchants ambulants proposent leurs articles aux chalands sur la rue qui longe notre hôtel, devant la gare. Le matin, avant l'aube, à cet endroit, viendront s'installer des paysans avec leurs légumes. Ils céderont la place à d'autres commerçants vers sept ou huit heures du matin.
A Tana, on peut acheter de la maroquinerie, des broderies, des voitures en boite de conserves...
La
nuit tombe vers 18 heures 30. A partir de ce moment, pour des raisons de
sécurité, nous sommes invités à éviter
de nous promener seuls dans les rues. Pour se déplacer, il est préférable
de prendre un taxi. Je décide de dîner à l'hôtel.
J'aurai l'occasion de goûter la production des vignobles de l'île.
Ils produisent des vins rouges, blancs, gris et rosés relativement
peu chargés en alcool (11,5°). Le vin rouge est le moins prisé.
Il est affecté d'un goût curieux difficilement identifiable.
Les vins blancs, rosés et gris sont agréables servis frais
en accompagnement de la cuisine locale, le poisson et les crustacés
par exemple.
2ème jour: de Tana à Antsirabe
Au départ de la capitale, au bord d'une rivière, on aperçoit des lavandières qui font sécher leur linge en l'étendant sur la prairie. Ce spectacle coloré va nous devenir familier. Route sur les hauts plateaux, à travers un paysage de rizières. La terre, à dominante de latérite, est de couleur rougeâtre (Lien sur les photos des Hautes Terres).
Le riz est la nourriture principale des Malgaches. Les rizières sont nombreuses dans tout le pays. On en trouve même en montagne et auprès des villes. Il y en a dans les faubourgs de la capitale. Malgré tout, la production locale n'est pas suffisante pour satisfaire les besoins d'une population en forte progression. Madagascar doit donc en importer. La culture du riz reste rudimentaire. Les rizières sont labourées avec des charrues tirées par des zébus. Le rendement ne doit pas être très élevé. Il existe une variété de riz typique de l'île: le riz rouge. La récolte du riz donne lieu à une cérémonie traditionnelle: les premiers grains récoltés sont jetés sur la maison, en une sorte de bénédiction, pour rendre hommage à la vie.
On cultive également à Madagascar du manioc, du maïs, des patates, de la canne à sucre, du café, du cacao, des épices (vanille, girofle...) et des piments, dont certains sont assez forts.
De part et d'autre de la route, nous apercevons des villages serrés autour du clocher de leur église, comme en France. La population de l'île pratiquait autrefois le culte des ancêtres. La plupart des Malgaches sont maintenant chrétiens, mais ils restent marqués par leurs traditions ancestrales. Les églises catholiques sont les plus nombreuses. On peut également voir des temples protestants et quelques mosquées musulmanes.
Selon les croyances malgaches, les morts servent d'intermédiaires entre les vivants et la divinité. Ils doivent être enterrés dans la terre des ancêtres. Lorsqu'ils meurent à l'étranger, le corps est rapatrié, parfois après un temps assez long pendant lequel il est déposé dans une sépulture provisoire. Tout le monde ne dispose pas immédiatement d'économies suffisantes pour payer les frais du voyage. Suivant les régions, les cadavres sont enterrés dans des caveaux, dans des grottes ou sous des pierres levées. Les corps sont enveloppés dans un linceul de soie sauvage et mis ou non dans des cercueils décorés de motifs colorés. Parfois les caveaux sont surmontés de totems et décorés d'ornements rappelant des événements de la vie du défunt, sa richesse, sa puissance sexuelle... Par exemple, un grand nombre de cornes de zébus symbolise la richesse. Chaque tombeau peut contenir plusieurs corps. Quand il est plein, on en construit un autre. Deux ou trois corps sont enlevés du caveau ancien pour prendre place dans le nouveau. Un caveau n'est jamais laissé vide pour ne pas attirer la mort et causer un décès dans la famille.
Au bout de quelques années (3, 4 ou 7 ans), on procède au retournement des morts. En août ou septembre, époque où les travaux des champs sont au ralenti, le défunt apparaît en rêve à un membre de la famille et se plaint d'avoir froid. Un devin est consulté pour déterminer la date de la cérémonie. Au jour dit, le corps est extrait du sépulcre. Il est ramené chez lui pour trois ou quatre jours. C'est l'occasion d'une grande fête à laquelle sont conviés les voisins et les amis. On sacrifie un zébu. On procède à des réjouissances rituelles: repas, chants et danses... On change le linceul du mort ou on en rajoute un autre. Puis on l'inhume à nouveau en faisant sept fois le tour de la sépulture en chantant et en dansant. Le retournement des morts entraîne une dépense qui excéderait les possibilités des gens les plus pauvres. Aussi, dans les villages, les familles désargentées s'associent-elles pour procéder au retournement collectif de leurs morts. Chez les Bars, qui enterrent leurs morts dans des grottes naturelles dont l'entrée est bouchée de pierres, le retournement des morts est précédé de la recherche d'une seconde cavité naturelle, plus élevée que la première, pour y ensevelir définitivement le défunt à l'issue de la cérémonie (Lien sur les photos des tombeaux).
Arrêt auprès d'un étalage de modèles réduits en bois peints de couleurs vives. C'est un spécialité artisanale régionale. La majeure partie des objets représentent des automobiles bien imitées (Lien sur les photos de l'artisanat).
Nous croisons un étrange cortège de charrettes tirées par des zébus. Le drapeau de Madagascar flotte sur la première. Ce cortège s'en va construire un caveau familial selon la tradition des hautes terres.
Démonstration du travail de la corne de zébu. On chauffe d'abord la corne pour en extraire la moelle. On la prépare ensuite en la sciant en fonction de l'objet final que l'on désire obtenir. Puis les différentes parties sont chauffées fortement pour les rendre malléables. On procède alors au façonnage de l'objet, puis à sa finition à la râpe et à la brosse. Un bel oiseau émerge ainsi progressivement sous nos yeux de la corne brute (Lien sur les photos de l'artisanat).
Arrivée à Antsirabe et logement à l'hôtel Arotel. Antsirabe est une cité thermale. Le sultan du Maroc Mohamed V y résida, durant son exil forcé, après avoir été détrôné par la France et remplacé par le Pacha de Marrakech El Glaoui, en 1952. Trois ans plus tard, il fut rétabli sur son trône, sous la pression des circonstances, et négocia l'indépendance de son pays.
Visite de la ville: l'hôtel à façade blanche, quelque peu désuet, où vécut Mohamed V, la gare désaffectée, le monument qui lui fait face et, devant lui, des pousses peints en rouges, tirés à bras, qui font office de taxis (Lien sur les photos d'Antsirabe).
Visite
d'une fabrique de bonbons artisanale. Du sucre et du citron sont mis à
fondre dans un chaudron pour obtenir une sorte de caramel. Lorsque la consistance
du mélange est jugée suffisamment épaisse, on le répand
sur une table de pierre préalablement huilée. On le brasse
en ajoutant des colorants naturels. La pâte est ensuite introduite
entre deux rouleaux creusés de moules qui donnent leurs formes aux
bonbons. Ces rouleaux font penser à l'appareillage d'une tréfilerie.
Les bonbons sont ensuite séparés. On en emplit des poches
de plastic que l'on scelle à la flamme d'une bougie. Tout est manuel
(Lien sur les photos
de l'artisanat).
.
Du temps d'Andrianampoinimerina deux jeunes malgaches, Rabeniomby et Ravolahanta, dont les amours étaient contrariés par leurs parents, se jetèrent dans le lac Tritriva après s'être enroulés dans leur lamba. A la suite de leur suicide, un arbre singulier s'éleva sur les bords du lac. Il affectait la forme de deux corps enlacés et il suffisait d'en pincer l'écorce pour qu'il en coulât du sang. Le lac Tritriva , situé à 18 km d'Antsirabé, est un lac de volcan aux parois abruptes, aux eaux vertes et glauques et à la profondeur insondable. |
Découverte des maisons de briques traditionnelles typiques de la région des hauts plateaux. Elles comportent un étage agrémenté d'une galerie (Lien sur les photos de l'habitat).
Sur le chemin, visite des artisans Zafimaniry (sculptures en bois de rose, marqueterie...) à Ambositra (Lien sur les photos de l'artisanat). Une jeune femme portant son bébé sur le bras me donne son adresse, m'invite à la photographier, puis me demande de lui faire parvenir la photo. Elle ajoute que je pourrais peut-être lui envoyer des vêtements pour elle et son enfant. Elle finit par me dire que l'envoi de vêtements reviendrait trop cher et qu'il serait préférable de lui adresser un mandat postal.
A midi, repas de brèdes. Il s'agit de légumes variés, sortes d'herbes ou d'épinards, qui constituent l'une des nourritures de base des Malgaches. Ces légumes sont servis avec de la viande. L'ensemble rappelle un pot-au-feu.
Sur la route, arrêt auprès de marchants d'articles de raphia. Cette fibre sert à de multiples usages. On en confectionne des chapeaux, des dessous de verre... mais aussi des nattes, des tissus colorés avec des pigments naturels. On peut, en effet, réduire le raphia en fils relativement minces. Autrefois, le tissage du raphia faisait partie de l'éducation des jeunes filles. Pour espérer trouver un mari, elles devaient apporter la preuve qu'elles étaient capables de fabriquer de beaux tissus, en quantité suffisante pour monter leur ménage (Lien sur les photos de l'artisanat).
Dans la région traversée, on fabrique du miel d'eucalyptus en plaçant les ruches très haut dans les arbres. L'eucalyptus est originaire d'Australie. Il présente l'avantage de pousser vite et l'inconvénient de rendre le sol acide et impropre à une autre culture. Un peu plus loin, on découvre un ingénieux moyen mis en oeuvre pour recueillir la résine des arbres. Le tronc est entaillé. Un feu est allumé à son pied. La chaleur fluidifie la résine et en facilite l'écoulement.
Logement
à l'hôtel Soafia.
4ème jour: de Fianarantsoa à Ranohira
Progressivement la physionomie des maisons change. L'adobe remplace la brique. Les toits de chaume font leur apparition (Lien sur les photos de l'habitat).
Sur le bord de la route, arrêt pour une démonstration de la fabrication de cordes en sisal (Lien sur les photos de l'artisanat). Le sisal est une sorte d'agave à longues fibres blanches. Ces fibres sont débarrassées de la pulpe en raclant les feuilles avec une machette. Une fois séchées, les fibres sont tressés à la main pour fabriquer des cordes très solides. Le travail s'effectue en famille. Une jeune femme racle les feuilles. Sa mère tresse les cordages entourée de nombreux petits enfants. Le grand père nous fournit les explications nécessaires. Il est l'ancêtre de cinquante quatre petits enfants. Si, dans les villes, les familles ne comptent que trois enfants en moyenne, à la campagne, la moyenne s'élève à huit enfants. La croissance démographique est donc encore très forte, ce qui ne va pas sans poser de nombreux problèmes: déforestation accélérée, insuffisance de la production vivrière...
Visite de la fabrique de papier Antaimoro à Ambalavao. La pulpe du bois qui sert de matière première est d'abord chauffée dans un bain. Ensuite, elle est martelée à la main, avec des maillets en bois, jusqu'à sa transformation en pâte. Ensuite les feuilles de papier sont confectionnées en déposant la pulpe sur un support et en y incorporant des motifs décoratifs constitués de pétales de fleurs. Le papier est ensuite séché au soleil. (Pour obtenir des explications complémentaires sur le papier Antaimoro, cliquez ici ; pour voir les photos, cliquez ici).
Vue du chapeau de l'évêque, une montagne au loin, en travers de la route, qui évoque plutôt le chapeau de Napoléon (Lien sur les photos du sud).
Traversée, en empruntant une piste de terre rouge impraticable pendant la saison des pluies, de l'immense plateau semi-désertique de l'Horombe. Paysage de steppe. Troupeau de zébus. Termitières. Corbeau pie: un oiseau noir au jabot et au col blancs. On prépare le plateau en vue de l'éclipse solaire du mois de juin 2001. Ce plateau constitue, en effet, par temps clair un lieu idéal d'observation. Malheureusement, les nuages gâcheront le spectacle et les nombreux touristes, venus là à cette occasion, s'en retourneront quelque peu déçus.
Au fur et à mesure que l'on s'avance vers le sud, le climat est de plus en plus sec et la végétation se fait rare. Les villages ne respirent pas l'opulence, c'est le moins que l'on puisse dire (Lien sur les photos de l'habitat).
Logement à l'hôtel "Le Relais de la Reine" , complexe moderne confortable situé au coeur du massif ruiniforme de l'Isalo, ensemble naturel le plus original de Madagascar.
Le matin, randonnée pédestre dans le massif à demi désertique de l'Isalo (Lien sur les photos de l'Isalo).
Chemin faisant, nous découvrons de curieux spécimens de la flore malgache (les tapias, les baobabs nains, l'herbe des belles mères...). Le tapia présente un air de famille avec l'olivier. Les vers à soie se nourrissent de ses feuilles et, avec un peu de chance, on peut voir quelque cocons dans les branches. Cette soie sauvage sert notamment à tisser les linceuls dont on enveloppe les morts. L'herbe des belles mères (je n'ai pas retenu son nom scientifique) est une plante très toxique que l'on utilisait autrefois pour empoisonner les condamnés à mort. C'était, en quelque sorte, la ciguë locale (Lien sur les photos de la flore).
D'innombrables formations rocheuses tourmentées jalonnent notre chemin. L'érosion a creusé la roche pour lui donner des formes bizarres. On nous fait admirer une carte de Madagascar gravée sur le sol. Ici ou là, dans la roche, nous remarquons les grottes funéraires fermées de pierres utilisées par l'ethnie Bar (Lien sur les photos des tombeaux). Dans les arbres, nous apercevons quelques termitières et fourmilières. Des lémuriens, d'espèce Maki , nous reçoivent dans leur milieu naturel. Ils se tiennent à distance, mais sans inquiétude excessive. (Lien sur les photos du Maki et lien sur les lémuriens apothicaires).
Au bout du chemin, dans le fond d'un canyon, les plus courageux se baignent dans la piscine naturelle d'une sorte d'oasis qui, après une longue traversée sans ombre, nous apporte un peu de fraîcheur.
L'après-midi, visite des jardins et vergers de l'hôtel. Cet hôtel, isolé au milieu des rochers, vit presqu'en autarcie. On y élève des lapins, des poules et des canards, destinés au repas du nombreux personnel et des visiteurs. Je lie conversation avec un grand gaillard en train de plumer quarante poulets pour le repas du soir. Jardins et vergers sont bien entretenus et convenablement irrigués. Grâce à cette irrigation, la végétation reprend ses droits. On y trouve des espèces qui nous sont familières (pêchers, abricotiers...), d'autres que j'avais déjà eu l'occasion de voir lors de mes voyages (papayers...) et d'en découvrir aussi de nouvelles (anones...).
De nombreux arbres fruitiers sont cultivés à Madagascar. On y trouve des fruits tropicaux (papayes, mangues, mandarines, litchis, bananes, anones, ananas, noix de coco...), mais aussi des fruits des régions tempérées (pommes, abricots, pêches...). Ceci s'explique par la topographie de l'île qui comporte grosso modo trois régions aux climats très différents: les hauts plateaux centraux tempérés mais où les nuits peuvent être froides pendant l'hiver austral, en juillet-août; le sud et l'ouest chauds et semi-désertiques; l'est, copieusement arrosé par les vents provenant de l'océan indien, où l'on rencontre une végétation qui rappelle celle de la forêt équatoriale.
Tentative
d'excursion à travers une forêt de roches qui rappelle les
formations karstiques de la région de Guilin (Chine) et de la baie
d'Halong (Vietnam). Les herbes sont aussi hautes que moi. Cela rend l'exploration
périlleuse, dans un dédale de collines aux falaises abruptes
où l'on doit s'égarer facilement. L'intérêt
de l'entreprise est, en outre, fortement réduit par la hauteur des
herbes qui limite le champ de vision. Comme je suis seul, j'abandonne la
partie et revient me promener sur les toitures en terrasses de l'hôtel.
La vue sur les falaises est féerique. Sous les rayons obliques du
soleil, on a l'impression de se trouver en face d'une immense construction
féodale en ruines.
6ème jour: de Ranohira à Toliara (Tuléar) puis Ifaty
Peu de temps après le départ de Ranohira, traversée d'une ville champignon hâtivement édifiée à proximité d'un gisement de pierres précieuses. Les constructions sommaires sont en bois et font irrésistiblement penser aux villes de la ruée vers l'or. Nous ne nous attardons pas dans ce nouveau Far West. La rue principale comprend de nombreuses officines de négociants de pierres précieuses (Lien sur les photos du sud).
Au bord de la route, nous apercevons des pierres levées. Ce sont les tombeaux de cette région. Plusieurs pierres correspondent à la sépulture d'une famille. La pierre la plus haute marque la tombe du père; une pierre moyenne, celle de la mère; une plus petite, celle d'un enfant.
A gauche de la route, le guide nous fait remarquer une plantation de coton. Cette plante textile est cultivée à Madagascar. Mais sa culture ne semble pas être très intensive.
Un peu plus loin, commencent à apparaître les majestueux baobabs, nombreux dans le sud de l'île. Nous découvrons aussi les impressionnants tombeaux décorés des ethnies de la région. (Pour en savoir plus sur les tombeaux Mahafaly, cliquez ici).
En traversant une bourgade, nous apercevons de curieux chariots couverts qui ressemblent à ceux de la conquête de l'ouest (Lien sur les photos du sud).
Nous passons à proximité d'un pénitencier où les voleurs de zébus purgent leur peine. Le vol d'un zébu est sévèrement réprimé. Ce délit est passible des travaux forcés à perpétuité. Il est vrai que les voleurs tuent assez souvent les gardiens des troupeaux. Ces derniers sont armés de piques et de fusils pour se défendre. Le risque encouru ne suffit pas à dissuader les malandrins. Il est vrai que, dans certaines régions, le vol d'un zébu est considéré comme une preuve de courage, de virilité et d'amour. Pour séduire une femme, il faut voler un zébu!
Le zébu joue un rôle central dans la culture malgache. La richesse d'un homme se déduisait autrefois du nombre de zébus qu'il possédait. Le sacrifice d'un zébu accompagne de nombreuses cérémonies (mariage, indemnisation en cas d'adultère, retournement des morts, réconciliation...). La valeur d'un zébu avoisine 800000 francs malagasy, ce qui constitue une dépense importante pour les personnes peu fortunées.
Voici quelques informations concernant le mariage et la vie des couples. En théorie, les Malgaches sont polygames. Mais, aujourd'hui, les hommes sont presque tous monogames. La polygamie est en voie de disparition, surtout en ville. Dans certaines régions, lorsqu'un homme cherche une épouse, il se place un peigne dans les cheveux. Les relations entre les personnes étaient autrefois régies par un système de castes. On distinguait trois castes: les nobles, les hommes libres, les esclaves. Ces castes se subdivisaient elles-mêmes en sous-groupes. Tout mariage hors de son groupe était prohibé. Cette interdiction conduisait parfois les jeunes gens à chercher leur conjoint en dehors de leur village. Aujourd'hui, cette coutume tend à disparaître. Toutefois, ceux qui ne la respectent pas sont encore mal considérés.
Le mariage obéit à un rituel précis au cours duquel deux orateurs se donnent la réplique en vantant chacun, à tour de rôle, les mérites du futur époux et ceux de la future épouse. Les parents du jeune homme doivent offrir un zébu à ceux de la jeune fille pour les dédommager de la perte d'une personne qui se livrait aux travaux ménagers. La personne la plus âgée de la famille bénit le couple pour consacrer le mariage. Si un homme veut épouser une seconde femme, il doit en aviser sa première épouse. Celle-ci peut accepter ou refuser. En cas d'acceptation, la seconde épouse se joint au foyer. Sinon, les biens du foyer sont divisés et les époux se séparent. Lorsqu'un homme trompe sa femme en cachette, il doit lui offrir un zébu en dédommagement.
Lorsque les cheveux d'un nouveau né ont poussé, la famille consulte le devin pour savoir quelle date sera propice à la tenue de la cérémonie de la coupe des cheveux. Au jour dit, les cheveux sont coupés puis déposés avec du riz et du miel sur une feuille de bananier. Le mélange est soigneusement malaxé puis mangé par la famille et les amis au cours d'une fête.
Pour accéder au rang d'hommes, les garçons doivent être circoncis par un spécialiste de cette opération. Comme cette cérémonie n'intervient que tous les sept ans, l'âge de l'enfant au moment de la circoncision est variable. L'enfant est d'abord séparé de sa mère. On cherche à l'effrayer pour l'endurcir. Puis le prépuce est coupé et mangé par le grand-père.
Dans l'une des régions de l'île, les jumeaux sont considérés comme une malédiction. Le premier des enfants qui sort est supposé doté de pouvoirs diaboliques. Autrefois, il était tué. Aujourd'hui, il est abandonné dans un orphelinat.
Arrêt à Toliara (Tuléar) en milieu de journée, déjeuner italien et visite du marché aux coquillages. Les environs de cette importante cité portuaire ressemblent à une décharge publique.
Poursuite du voyage en direction d'Ifaty sur une piste de sable qui est de loin la plus mauvaise rencontrée pendant le voyage. Il faudra l'après-midi pour accomplir la trentaine de kilomètres qui nous séparent de notre destination. Nous longeons la mer et ses mangroves. Chemin faisant, nous découvrons de nouveaux spécimens de la flore malgache, notamment un curieux épineux qui s'arc-boute contre le vent et l'euphorbe dont on recueille la sève blanchâtre, qui rappelle, par sa consistance et son élasticité, le latex. Ce suc est employé pour calfeutrer les pirogues.
Dans l'ensemble, à l'exception de cette piste interminable et du plateau de l'Horombe, nous n'avons pas eu à nous plaindre de l'état des chaussées. Elles sont asphaltées et pas trop chaotiques. Évidemment, ce ne sont pas des autoroutes, mais j'avoue m'être attendu à pire.
Arrivée
le soir à Ifaty, petit village de pêcheurs, et installation
en bungalows à l'hôtel "La Saline". Nous sommes maintenant
à l'est de l'île, sur le canal du Mozambique. Le climat et
sec et la végétation s'en ressent.
7ème jour: Ifaty (Lien sur les photos d'Ifaty)
Le matin, visite du village de pêcheurs. Nous assistons au relevé du filet, opération longue et délicate, minutieusement exécutée et dirigée, et à laquelle participent deux groupes de pêcheurs guidés par un autre qui est au large dans une pirogue. Nous lions conversation avec l'instituteur qui est venu chercher les quelques poissons que les pêcheurs voudront bien mettre gratuitement à sa disposition. Des vendeuses de tissus et de coquillages déambulent sur la plage en quête d'éventuels acheteurs. Elles aussi obtiendront quelques poissons.
L'après-midi, excursion à la forêt des baobabs. Poursuite de la découverte de la flore: l'arbre bouteille, qui peut être confondu avec le baobab par les personnes non averties, il tient son nom de la forme de son tronc, laquelle évoque celle d'une bouteille, l'euphorbe déjà citée, le filao, le balsa, très léger, qui sert à confectionner les pirogues, le kapokier qui fournit une sorte de coton et, bien sûr, de nombreux baobabs. Sur l'un d'entre eux, nous apercevons plusieurs nids d'oiseaux artistement tressés. L'oiseau y pénètre par le bas à travers une sorte de tunnel (Lien sur les photos de la flore).
Le
baobab, selon une légende malgache, ne se trouvait pas assez beau.
Pour le punir, Dieu l'arracha et le replanta la tête en bas. C'est
pourquoi désormais ses branches ressemblent à des racines.
Le baobab, arbre monumental des régions sèches, va puiser
l'eau très profondément dans le sol. Une sève abondante
irrigue son tronc volumineux dont la couleur est voisine de celle de la
terre. Les Malgaches y forent des trous pour recueillir le liquide et s'en
désaltérer.
A
l'entrée de la forêt, un troupeau de chèvres broute
les épineux. Il appartient probablement aux habitants du village
voisin qui habitent des cases aux murs de claies en bois entrelacé.
Ces cases, typiques de la région, sont petites et rudimentaires.
Elles abritent néanmoins une famille (Lien
sur les photos de l'habitat).
8ème jour: d'Ifaty à Toliara (Tuléar) puis Tana
Retour
à Tuléar pour prendre l'avion qui nous ramènera à
Tana où nous retrouverons l'hôtel Tana Plaza.
9ème jour: de Tana à Andasibe
Route asphaltée, en assez bon état, qui chemine à travers les hauts plateaux. Rizières, meules retenues par des perches... (Lien sur les photos de l'est).
Visite des collections vivantes d'un passionné de la faune et de la flore malgache: crocodiles, caméléons de diverses tailles et couleurs, grenouilles naines oranges, papillons multicolores (nous en avons également admiré lors de la randonnée dans l'Isalo), chauves souris géantes etc...(Lien sur les photos de la faune).
Visite
du musée de la gendarmerie. Nous y voyons des canons offerts au
souverain de Madagascar par le roi d'Angleterre, au début du 19ème
siècle. Ici, comme ailleurs, la lutte d'influence fut vive entre
la France et l'Angleterre. On nous montre une réplique du wagon
troué de balles dans lequel furent mitraillés, par les troupes
coloniales françaises, les prisonniers de l'insurrection qui suivit
la fin de la seconde guerre mondiale. Plusieurs intellectuels malgaches
(Raseta, le poète Rabemananjara, qui vit maintenant en France) étaient
à la tête de la révolte. Celle-ci fut matée
et, en signe de réconciliation, les Malgaches égorgèrent
un zébu qui fut mangé avec les autorités françaises.
Voici quelques informations concernant les dramatiques événement de 1947. Le 30 mars de cette année une insurrection éclate à Madagascar. Le chef de district d'Ambatondrazaka fait procéder à des arrestations massives de militants politiques dont le mouvement avait pourtant désapprouvé l'insurrection. Le 5 mai, 166 otages sont transférés à la gare et enfermés dans trois wagons plombés, affectés habituellement au transport des bestiaux. Le convoi parvient au début d'après-midi en gare de Moramanga. Vers minuit, sous prétexte que des insurgés s'apprêtent à délivrer les otages, les militaires de garde reçoivent l'ordre de faire feu sur le train. Ce premier massacre épargne 71 otages. Les rescapés sont mis en prison, questionnés et laissés sans nourriture. Le jeudi 8 mai, ils sont conduits devant des fosses communes préalablement creusées. Ils y seront tous fusillés. Cette exécution sommaire massive ne peut pas être considérée comme une bavure imputable à des subalternes ayant perdu leur sang-froid. L'ordre d'exécuter les otages a été donné régulièrement par un général français. L'un des otages, Rakotoniaima, laissé pour mort, s'échappera et racontera la tuerie. |
10ème jour: d'Andasibe à Foulpointe
Le matin, visite de la réserve de Périnet pour observer les lémuriens Indri Indri dans leur habitat naturel, au milieu de la forêt. Chaussures de marche, vêtements de pluie et lotion anti-moustiques. Végétation luxuriante, vigne sauvage, fruits blancs à forme de poire, lianes étrangement nouées... (Lien sur les photos de l'est).
Nous entendons bientôt le cri d'alarme des lémuriens. Nos deux guides partent à la recherche d'une famille et nous engagent à patienter où nous nous trouvons. Après un assez long moment, ils reviennent. La première famille n'a pas été trouvée. Mais la seconde a consenti à se laisser approcher. Nous allons assister à la nourriture et aux acrobaties de ses membres en haut des arbres.
L'Indri Indri est un animal social. Il vit en famille. Il est rare que les familles se fassent la guerre. Toutefois, une famille repousserait une autre famille qui chercherait à empiéter sur son territoire. Le combat s'arrêterait cependant avant la mort du vaincu. Le territoire doit être suffisamment vaste pour que tous les membres de la famille puissent y trouver leur subsistance. L'Indri Indri se nourrit de feuilles et de fruits de la forêt primitive. Il dédaigne les espèces introduites par l'homme. Il vit dans les arbres où il se déplace avec agilité en sautant d'une branche à l'autre, d'un arbre à l'autre. Lorsqu'un mâle devient adulte, vers cinq ou six ans, il doit se chercher une femelle dans une autre famille. Jamais les Indri Indri ne s'accouplent dans une même famille. Les problèmes de consanguinité sont donc évités. Le jeune mâle part à la recherche de sa future compagne. S'il en trouve une qui lui convient et s'il parvient à la séduire, il la ramène dans sa famille pour la présenter. Lorsque celle-ci est agréée, un nouveau couple se forme. Ce couple peut rester dans la famille si le chef estime que le territoire est assez vaste pour nourrir tout le monde. Sinon, il doit se trouver un territoire vierge pour y fonder une nouvelle famille, dans laquelle sa descendance prendra place tant que les ressources resteront suffisantes. Le nombre des membres d'une famille dépasse rarement sept ou huit individus. Au delà, l'essaimage se produit. La découverte d'un espace où s'installer ne pose pas de problème particulier au jeune ménage compte tenu de la faible densité de la population et de l'immensité de la forêt.
Le langage des indri indri se décompose en trois cris bien distincts assez facilement identifiables: le cri d'alerte, le cri de communication et le cri d'amour. Le premier, que l'on entend lorsque l'on approche ces lémuriens, est évidemment destiné à mettre la famille en garde. L'animal qui vient d'apercevoir des intrus ou de déceler un danger potentiel prévient ainsi les autres membres de la famille. Le second ne vise pas à prévenir mais simplement à manifester sa présence dans un souci d'échange et de convivialité. Le cri de l'amour, quant à lui, est presqu'inaudible. Il rappelle celui d'un baiser avec le même mouvement de la bouche.
Ce type d'organisation sociale, basé sur la famille, suppose la stabilité du couple fondateur. L' Indri Indri est, en effet, monogame et d'une fidélité à toute épreuve. La femelle met bas un bébé unique tous les 3 ans. Après sa naissance, le bébé Indri s'agrippe d'abord à la poitrine de sa mère. Un peu plus grand, il émigre sur son dos avant de devenir autonome. L'Indri Indri ne supporte pas la captivité et se laisse dépérir lorsqu'il est capturé.
Je cite ces renseignements de mémoire en espérant qu'ils ne comportent pas trop d'oublis et surtout d'erreurs. J'avais pris des notes, mais je les ai égarées au cours du voyage. (Lien sur les photos des Indri Indri).
Le changement de climat m'a valu un gros rhume. Mon nez coule. Ma provision de mouchoirs est épuisée. On me fait cadeau de quelques serviettes de papier dans un restaurant. Elles sont rapidement hors d'usage. Comme aucun mouchoir n'est en vente, j'en suis réduit à acheter un napperon pour me moucher!
Nous nous arrêtons dans un village (Lien sur les photos de l'habitat). Les cases sont différentes de celles du sud. Les murs sont en lattes de bois et les toits sont recouverts de tôle ondulée. Nous allons saluer l'infirmière du lieu. Elle nous explique en quoi consiste son travail: soins divers, piqûres, accouchements... Elle nous demande de lui laisser quelques médicaments, si nous en avons. Nous abordons ensuite le sujet de la prochaine éclipse de soleil. Elle redoute cet événement et nous demande s'il ne sera pas suivi d'épidémies. Ensuite, elle nous accompagne à l'école primaire du village où nous sommes aimablement reçu par le directeur (Lien sur les photos de l'est).
Cette école comporte plusieurs classes (quatre si ma mémoire est bonne). Les enfants paraissent sages et disciplinés. Les cours sont d'abord dispensés en langue locale. Puis, dès la septième, les cours sont dispensés pour moitié en Malgache et pour moitié en Français. Aussi presque tous les Malgaches parlent-ils notre langue correctement. Après avoir écouté l'hymne national et quelques chansons du folklore français, nous quittons l'école en y laissant quelques fournitures scolaires très appréciées. L'école est gratuite à Madagascar. Mais les fournitures sont à la charge des parents. Nombre de ceux-ci sont trop pauvres pour les payer. La scolarisation d'un enfant pendant un an revient à 60000 francs malagasy, une ardoise et une boîte de craies à 11200 fmg. C'est pourquoi l'école ne peut pas être obligatoire.
En cours de route, arrêt pour assister à la fabrication des claies de bambous utilisées dans la fabrication des cases de la région (Lien sur les photos de l'artisanat). Ces cases ont à peu près la superficie d'une pièce de chez nous. Elles servent d'abri à des familles de sept à huit personnes. Un arbre à piments jouxte la maison du fabricant de claies. J'en profite pour cueillir un fruit rouge et mince, à peine plus long qu'une phalange. Il a bon goût mais est plutôt fort. Attention à ne pas me frotter les yeux!
Collines couvertes d'arbres du voyageur. En les photographiant, je reconnais, sur le talus de la route, des plantes carnivores (ou sensitives?) que j'ai déjà vues voici plus de 20 ans à Ceylan.
La culture itinérante sur brûlis est pratiquée dans cette région de la grande île. Le paysan construit sa case familiale auprès du champ débarrassé par le feu des mauvaises herbes, des broussailles et des arbustes. Il creuse des trous avec un bambou dans le champ fertilisé par les cendres pour y enfouir les graines. Le sol s'épuise rapidement. Le paysan abandonne alors terrain et case pour chercher un autre endroit où recommencer le processus. La structure des cases, adaptée à cette agriculture semi-nomade, est évidemment légère: des cloisons de branchages entrelacés et une toiture de feuillage.
Arrivée le soir, en bord de mer, à Foulpointe, ancien comptoirs français sur la route des Indes. Installation à l'hôtel Manda Beach (Lien sur les photos de l'est). Dans la salle d'eau de mon bungalow, je découvre une énorme araignée de couleur beige. Renseignements pris, cet animal est inoffensif. Il a d'ailleurs eu plus peur que moi et s'est réfugié derrière une plinthe. A mon retour, il s'est éclipsé sans que je sache si sa disparition est due à l'intervention du personnel de l'hôtel.
Comme j'ai remis mon passeport à la réception, je n'ai pas pu cacher ma date de naissance et l'agence de voyage me souhaite bon anniversaire en offrant deux bouteilles de vin blanc à l'ensemble du groupe. On s'excuse de n'avoir pas eu le temps de faire confectionner un gâteau.
11ème jour: de Foulpointe à Tamatave
Le matin, promenade sur la plage. Je suis assailli par de jeunes vendeurs de colliers fabriqués avec des graines des plantes du pays. Couleurs naturelles garanties. Les enfants me disent leur nom pour que je me souvienne d'eux à mon second passage. Je retiens Fabien et Lisette. Lisette, qui doit compter neuf ou dix printemps, est très gracieuse. En repassant, je décide de lui acheter un collier. Mais c'est aussitôt la cohue. Tout le monde veut m'en refiler et chacun prétend être le premier à m'avoir vu. Après beaucoup de palabres, je repars lesté d'une dizaine de colliers et en laissant derrière moi plusieurs mécontents.
Le soir, arrivée à Tamatave, premier port de Madagascar. Il pleut. Notre hôtel, le Neptune, est à proximité du port, sur une rue fréquentée par de jeunes prostituées. Des préservatifs sont à notre disposition dans les chambres. Tamatave, à la nuit tombante, ne fait pas bonne impression. La chaussée et les trottoirs sont en mauvais état et les façades paraissent lépreuses.
12ème jour: de Tamatave à Sainte-Marie (Nosy Boraha)
Le matin, visite de Tamatave: la place principale avec ses palmiers, sa statue, ses bâtiments officiels... Le marché avec ses fruits et ses fleurs exotiques, ses étals de viande où l'on vend même des pieds de zébus, ses meubles, notamment de nombreux lits en bois marron clair... est pittoresque et coloré. Je peux enfin y acquérir un lot de mouchoirs (Lien sur les photos de Tamatave).
Je profite de la présence d'un distributeur de monnaie, dans une filiale locale de la BNP, pour tirer un peu d'argent avec ma carte Visa.
Départ en avion pour Sainte-Marie, une petite île à quelque dizaines de kilomètres au large de Madagascar. Cette île tient son nom du jour de sa découverte par les Portugais, le 15 août. Elle était autrefois régie par sa propre souveraine dont on peut encore voir le modeste palais dans la bourgade qui tenait lieu de capitale. Elle dépend maintenant administrativement de la grande île. C'est un lieu de villégiature prisé des touristes.
Nous arrivons, en fin de matinée, à l'hôtel Soanambo, littéralement l'arbre à pain. Les bungalows sont bâtis le long d'une étroite mais longue plage de sable fin bordée de palmiers. Des passages couverts de palmes permettent d'aller d'un bâtiment à l'autre sans se mouiller, ou presque, en cas d'averse.
Des enfants du village voisin se promènent sur la plage. Ils proposent quelques articles de la production locale et nous demandent de leur faire cadeaux de nos tea shirt. Mon interlocutrice est une petite fille. Comme je lui fais observer que je n'ai pas de vêtement féminin, elle me répond: "Pour mon papa, il n'en a pas!"
Le soir, dîner de langoustes chez Claudine, en face de l'hôtel. De longues anglaises de papier collant à mouches, lestés en bas d'une cartouche rouge, pendent du plafond. Avec les enfants jouant au cerceau aperçus dans l'après-midi, voici de quoi me rappeler mon enfance.
13ème jour: Sainte-Marie (Nosy Boraha) (Lien sur les photos de Sainte-Marie)
Excursion à travers l'île, notamment jusqu'au cimetière des pirates. Au début du 19ème siècle, des corsaires français, chassés de l'île Maurice (ex-île Bourbon) à la suite du traité de Paris (1815), trouvèrent à Sainte-Marie une crique bien abritée où ils pouvaient mouiller tranquillement, sous la protection des collines qui commandent la passe. Là, ils se tenaient à l'affût du passage des navires britanniques sur la route des Indes pour les attaquer à l'improviste. Plusieurs membres de ces équipages moururent sur l'île où ils furent ensevelis, parfois sous des pierres tombales gravées de signes évoquant leur origine et leur destin.
Visite de la capitale de l'île et de son marché. Des abeilles par dizaine butinent le riz légèrement sucré des étals. Je fais quelques emplettes dans un magasin qui accepte le paiement par cartes. Comme la somme minimum doit atteindre 100000 francs malagasy, la vendeuse complète mes achats avec des objets supplémentaires.
Cascade vu du chemin. Rochers en bords de mer. Culture de riz sur les pentes abruptes d'une colline, dans un endroit inattendu. Mais il s'agit de riz d'altitude différent de celui qui se cultive en rizières.
En fin de matinée, arrivée, sous la pluie, au restaurant situé au bord d'une baie.
On parle beaucoup du naufrage du traversier qui assurait la liaison entre Sainte-Marie et la grande île. La catastrophe a eu lieu voici quelques jours. Des équipes sont encore à la recherche des corps au large de l'endroit où nous nous trouvons. Il y aurait eu vingt sept noyés, dont quelques touristes français. La cause du naufrage n'est pas élucidée. Mais tout le monde dénonce l'état déplorable du navire. Il avait déjà subi une avarie l'été dernier. L'inspection diligentée à cette occasion avait révélé sa vétusté ainsi que l'absence de moyens de sécurité. Le bâtiment ne comportait ni canots de sauvetage, ni bouées, ni appareil de radio pour jeter l'alarme. Malgré la constatation de ces lacunes, l'armateur indien n'avait pris aucune mesure. Le navire prenait souvent la mer fortement surchargé. Une personne affirme qu'elle a décidé, l'an dernier, de ne plus l'emprunter car, lors de son dernier voyage, la mer affleurait le plat bord. On s'accorde à dire qu'il aurait suffi que le capitaine dispose d'un moyen de communication pour sauver la plupart des naufragés. De nombreux bateaux de pêche étaient à l'ancre au port, prêts à se rendre sur les lieux. Le traversier devait aborder le soir. On ne se rendit compte que le lendemain matin de son absence. Il était alors trop tard pour intervenir avec efficacité. Malgré la présence de compatriotes parmi les victimes, je n'ai trouvé aucune allusion à cette catastrophe dans les journaux français. Les journaux malgaches la commentaient bien sûr abondamment.
Comme il me reste suffisamment de temps avant le déjeuner pour gravir la colline jusqu'au point de vue qui domine la baie, je décide de profiter d'une accalmie pour m'y rendre. Le sentier traverse d'abord une pelouse très pentue pour parvenir à un chemin de terre assez périlleux. Comme le terrain est détrempé, j'hésite un moment à m'y engager. Je finis par m'y résoudre en prenant beaucoup de précaution. Je parviens en haut sans encombre. La vue est magnifique. Je prends quelques photos et redescend prudemment. Parvenu à la pelouse, je me pense tiré d'affaire. J'évite de marcher sur la pulpe blanche d'un fruit écrasé que j'aperçois sur le sol et, ce faisant, je pose le pied sur un autre sournoisement caché dans l'herbe. Ce n'est pas une banane, mais c'est plus glissant qu'une savonnette! Je me retrouve sur les fesses après avoir entendu un sinistre craquement au niveau de ma cheville droite. Je me relève et regagne, en claudiquant, le restaurant. Mes vêtements sont maculés de pourriture et la pâleur de mon visage inquiète mes compagnons de voyage. La douleur est intense. J'ai soif. Au cours du repas, je bois deux demi bouteilles de vin, ce qui m'est inhabituel. On pense que je me suis foulé la cheville. Peut-être les noyés m'ont-ils crocheté la jambe puisque, selon les croyances locales, c'est dans la tradition des morts que de faire des niches aux vivants! On me conseille des bains d'eau de mer. L'épouse du restaurateur en puise deux pleins seaux dans la mer et me voici mon pied droit dans une bassine pour l'après-midi. Un touriste français, en route pour un tour du monde en quatorze mois, me donne quelques médicaments, pour calmer la douleur et faciliter la circulation du sang.
Rien
n'a été prévu, en cas d'accident, par l'agence de
voyage et il ne faut pas compter sur un médecin à Sainte-Marie.
Le soir, le guide m'amène une masseuse qui me triture sans ménagement.
Je serre les dents pour ne pas paraître douillet. Elle emmaillote
ensuite mon pied meurtri dans un bandage.
14ème jour: de Sainte-Marie (Nosy Boraha) à Tana
Le matin, aucune amélioration: retour de ma sorcière locale pour une répétition du traitement. Elle dépose ensuite sur ma cheville un enduit magique à base de gingembre pilé. Cet emplâtre mis, sur une jambe qui n'est pas de bois, transforme peu à peu mon pied en pomme cuite, si j'en juge par l'ardeur qui le brûle, sans lui en donner la saveur, du moins je l'imagine.
Pour moi, l'escapade en grande Lémurie s'est achevée. Je ne visiterai pas l'île aux nattes, située au sud de Sainte-Marie. Je patienterai au bar de l'hôtel jusqu'au départ pour l'aéroport. Je me console en pensant que j'aurais pu finir, comme certains de mes compatriotes, dans le ventre d'un requin!
Retour par avion à Tana en fin d'après midi. Visite du marché d'art et d'artisanat. Le boiteux se contentera d'un petit tour dans les premières baraques où l'on propose des médicaments du cru, notamment un aphrodisiaque à base de plantes. De l'autre côté de la route, entre celle-ci et des rizières, au milieu de la ferraille rouillée d'un casseur, un rosier a poussé, comme par miracle. Il porte une seule rose rouge.
Nous regagnons notre hôtel à la nuit tombée.
Le lendemain, à cinq heures du matin, nous prenons l'avion pour la France. Je décide donc de faire l'impasse sur les hôpitaux malgaches et de patienter jusqu'à mon retour à Paris. Sur le chemin de l'aéroport, nous repassons devant les baraques visitées la veille. Certaines d'entre elles ont été endommagées pendant la nuit par le renversement d'un poids lourd. Pour une raison inconnue, le véhicule a quitté la chaussée et s'est couché sur le flanc.
De retour en France, j'apprendrai alors que je me suis fracturé le péroné. Les sorciers français seront, du moins je l'espère, plus efficaces que la masseuse de Sainte-Marie!
La population de Madagascar est d'origine asiatique et africaine. Il existe dans l'île plusieurs ethnies dont les caractéristiques physiques et les cultures sont différentes mais qui semblent cohabiter sans trop de difficultés. Le peuplement serait relativement récent. Il aurait débuté au Vème siècle.
Les Malgaches sont accueillants. Ils ont le sourire facile et ne font preuve d'aucune agressivité à l'encontre des étrangers blancs qu'ils appellent les "vazahas" (prononcer vazas). De nombreuses personnes exercent le commerce d'objets d'artisanat dans les rues à l'intention des touristes. Leur insistance est parfois excédante, mais la pauvreté incite à l'indulgence .
Le salaire moyen mensuel d'un ouvrier malgache avoisine 450000 fmg (500 FF). Le loyer revient à 270000 fmg, la nourriture par jour et par personne à 1900 fmg, un kilo de riz à 3000 fmg, les vêtements pour un enfant à 50000 fmg, le kit de départ pour une famille (casseroles, riz etc...) à 550000 fmg, une machine à coudre à 500000 fmg etc... Ces quelques indications permettent de se faire une idée du niveau de vie du pays.
L'influence française est partout très présente. Notre langue est largement utilisée sur les panneaux d'affichage et les enseignes des magasins. Elle est partout comprise et parlée. Les postes de responsabilité des hôtels sont souvent tenus par nos compatriotes ou des ressortissants des pays francophones. Bien entendu, des quotidiens sont publiés en langue française. Bref, un Français ne se sent pas vraiment dépaysé dans la grande île.
Pour obtenir des informations concernant la santé, cliquez ici.
Pour obtenir des informations générales sur la grande île rouge, cliquez ici.
Remarques: Les notes de voyage ci-dessus
ont tiré largement partie des informations communiquées par
l'agence de voyage malgache et par ses guides. Les documents officiels
fournis lors de l'entrée dans le pays ont également fourni
de précieux renseignements.